“En solidarité, nous résistons : Notre lutte, notre droit!”

English / Español

En ce 28 mai – Journée Internationale d’Action pour la Santé des Femmes – les militant·e·s et mouvements pour la justice sociale à travers le monde se mobilisent dans une résistance collective pour défendre et faire progresser les droits et la justice en matière de santé sexuelle et reproductive (DSSR) pour toutes et tous. Nous exigeons que les gouvernements remplissent leurs obligations au regard des mécanismes internationaux des droits humains et qu’ils fassent de la DSSR une priorité dans les agendas de développement, en reconnaissant qu’elle est non seulement essentielle, mais aussi indissociable de la réalisation de l’égalité de genre, de la justice sociale et du développement durable. Nous revendiquons et affirmons le droit de toutes les femmes, filles et personnes de genre divers à l’autonomie corporelle. Nous résistons fermement face à l’opposition croissante et à leur agenda régressif – mené par des forces de droite, nationalistes, fondamentalistes religieuses et autoritaires – qui cherchent à contrôler nos corps, propager des discours anti-droits, alimenter la désinformation, restreindre l’accès aux informations et services de santé sexuelle et reproductive, et remettre en cause les avancées durement acquises.

Le thème du 28 mai 2025, « En solidarité, nous résistons : Notre lutte, notre droit ! », reflète l’urgence et la puissance de la résistance collective face à une contre-offensive mondiale alarmante contre les droits et la santé sexuelle et reproductive (DSSR), menée par des acteurs anti-droits bien financés et organisés. Ces attaques ne sont ni des incidents isolés ni de simples changements politiques ; elles s’inscrivent dans une stratégie transnationale délibérée, enracinée dans le patriarcat et l’autoritarisme. Unies par un agenda oppressif commun, ces forces cherchent à contrôler l’autonomie corporelle, à faire taire les mouvements fondés sur les droits, et à démanteler les systèmes de soin et de soutien qui garantissent la DSSR et la justice.

L’agenda de l’opposition

Lois et politiques restrictives

Les agendas de l’opposition promeuvent des lois et politiques restrictives qui limitent l’autonomie corporelle, restreignent les droits reproductifs et criminalisent l’accès aux services essentiels de santé sexuelle et reproductive. Ces barrières juridiques sont souvent aggravées par la stigmatisation sociale, le refus de prise en charge par des prestataires en raison de convictions culturelles ou religieuses, ainsi que par des obstacles socio-économiques qui entravent l’accès à un avortement sûr, légal et sans stigmatisation. Même dans des pays où l’avortement est protégé par la Constitution – comme en France – l’accès demeure inégal. La « double clause de conscience », par exemple, permet aux professionnel·le·s de santé de refuser de pratiquer un avortement. Combinée à la désinformation en ligne et à la pression croissante des groupes anti-avortement, cette disposition compromet davantage l’accès aux soins.

Dans des contextes plus répressifs, de nouvelles lois intensifient ces obstacles. En Iran, où l’avortement est déjà pratiquement interdit sauf en cas d’anomalie fœtale ou de danger pour la vie de la personne enceinte, le gouvernement a renforcé les restrictions en adoptant une loi transférant l’autorité d’approuver un avortement thérapeutique à un panel composé d’un·e juge, d’un·e médecin et d’un·e médecin légiste. Cette mesure renforce le contrôle de l’État sur les décisions reproductives, prive les personnes enceintes de leur pouvoir de décision et institutionnalise un processus qui dissuade l’accès rapide et sécurisé aux soins d’avortement.

Parallèlement, un nombre croissant d’États américains ont adopté des lois interdisant les soins de santé affirmant le genre et introduisent des législations anti-LGBTQ+, compromettant l’accès équitable à des soins médicaux de qualité fondés sur des données probantes. En janvier 2024, 27 États avaient promulgué des lois restreignant l’accès des jeunes aux soins de transition, bien que leur sécurité et leur nécessité soient reconnues par toutes les grandes associations médicales. Alors que certains pays connaissent une régression active, aux Philippines, une législation progressiste comme la loi sur l’égalité SOGIE reste en attente depuis plus de 25 ans. Les groupes conservateurs et anti-droits continuent d’en retarder l’adoption, empêchant l’instauration de protections juridiques contre les discriminations envers les populations vulnérables – notamment les peuples autochtones, les jeunes, les personnes handicapées et la communauté LGBTQIA+ – en particulier dans l’accès aux services de base, à la sécurité et à la protection.

En 2024, le Conseil national de transition du Mali a adopté une loi criminalisant l’homosexualité, suivant l’exemple de l’Ouganda qui, en mai 2023, avait promulgué l’« Anti-Homosexuality Act » – l’une des lois anti-LGBTQ+ les plus sévères au monde, prévoyant notamment la peine de mort pour « homosexualité aggravée ». Ces lois institutionnalisent l’homophobie et la transphobie d’État, tout en renforçant la stigmatisation, la discrimination et la violence à l’encontre des personnes de genre divers. Une telle criminalisation sape les principes fondamentaux des DSSR en niant aux individus le droit de prendre des décisions éclairées sur leur corps, d’accéder à des services de santé inclusifs et de vivre à l’abri de la violence et de la coercition. Lorsque les lois entretiennent la peur au lieu de protéger, elles marginalisent davantage des communautés déjà vulnérables et limitent l’accès à des services vitaux liés aux DSSR, y compris la prévention du VIH, les soins de santé mentale et les traitements affirmant le genre.

Réduction des financements, rétrécissement de l’espace civique et attaques contre les défenseur·e·s des droits humains

Une stratégie centrale du mouvement mondial anti-droits consiste à réduire délibérément les financements, à restreindre l’espace civique et à attaquer les défenseur·e·s des droits humains, dans le but d’entraver les avancées en matière de DSSR et de justice. Les politiques étrangères régressives – notamment le rétablissement et l’élargissement du Global Gag Rule (GGR) par l’administration américaine – ont conduit à d’importantes coupes budgétaires, perturbé les services essentiels de santé sexuelle et reproductive, et créé un climat de peur chez les défenseur·e·s des droits en santé reproductive dans de nombreux pays. En interdisant aux ONG recevant une aide américaine de fournir ou de promouvoir les services liés à l’avortement, le GGR a fragilisé l’accès aux soins reproductifs dans le monde entier. L’impact de ces politiques est encore amplifié par la montée du nationalisme isolationniste, des idéologies anti-droits et du fondamentalisme conservateur, incitant d’autres pays donateurs à réduire également leur aide aux programmes de DSSR. Cela a creusé les déficits de financement et mis en péril les systèmes de santé essentiels, notamment dans le Sud global.

Ces réductions budgétaires touchent également les grandes institutions mondiales de santé. Des acteurs clés comme l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA) et ONUSIDA ont subi d’importants revers dans leurs activités et leur portée. La récente décision des États-Unis de suspendre le financement de l’UNFPA devrait avoir des conséquences dévastatrices pour les femmes, les filles et les travailleur·euse·s humanitaires, en particulier dans les contextes de crises humanitaires aiguës. L’ONUSIDA estime que si les financements du PEPFAR (Plan d’urgence du Président des États-Unis pour la lutte contre le SIDA) étaient définitivement coupés, 4 millions de décès supplémentaires liés au SIDA et 6 millions de nouvelles infections pourraient survenir d’ici 2029 – rendant irréalisable l’objectif de mettre fin au SIDA d’ici 2030. Selon un rapport des Nations Unies, plus de la moitié des organisations d’aide desservant les femmes les plus vulnérables du monde risquent aujourd’hui de fermer dans les six mois à venir, faute de moyens financiers suffisants.

Parallèlement à ces attaques financières, le rétrécissement de l’espace civique est devenu une menace croissante. En Europe de l’Est, en Asie centrale, ainsi que dans certaines régions d’Asie et d’Afrique, les gouvernements utilisent de plus en plus les lois sur les « agents étrangers » pour réprimer les voix dissidentes, intimider la société civile et faire taire les organisations fondées sur les droits. En Inde, la Foreign Contribution Regulation Act (FCRA) impose des sanctions pénales aux ONG recevant des fonds étrangers sans certification officielle. De même, la nouvelle loi géorgienne sur les « agents étrangers » s’inscrit dans une dynamique similaire à celle observée en Slovaquie, en Chine, en Ouganda ou au Cambodge. Ces lois – devenues un outil privilégié des régimes autoritaires – visent directement les organisations qui fournissent des services essentiels, souvent vitaux, en matière de DSSR.

Ce climat politique et économique hostile a également conduit à la dépriorisation systématique des DSSR au niveau national. En Argentine, l’administration du président Javier Milei a interrompu l’achat et la distribution de fournitures médicales liées à l’avortement, telles que le misoprostol, la mifépristone et les kits d’aspiration manuelle, bloquant ainsi l’accès à l’avortement légal et sécurisé. Au-delà des choix politiques, de nombreux gouvernements sont aussi contraints par le poids de la dette, ce qui limite fortement leur capacité à financer les programmes sociaux, y compris ceux liés à la santé. Ces pressions économiques, combinées à des agendas politiques régressifs, exacerbent les inégalités dans l’accès aux DSSR et privent des millions de personnes – notamment des femmes, des filles et des personnes LGBTQIA+ – de leur droit à la santé, à la dignité et à l’autonomie corporelle.

De plus, alors que les espaces numériques deviennent centraux dans l’activisme et l’accès à l’information, les violences de genre facilitées par la technologie posent de nouvelles menaces insidieuses pour les personnes en quête de soins ou militant pour leurs droits en ligne. Les défenseur·e·s des droits humains sont de plus en plus exposé·e·s à des campagnes de harcèlement numérique coordonné, au doxxing, à la surveillance, à la criminalisation, voire à des violences physiques – en particulier lorsqu’ils ou elles contestent les récits anti-droits ou défendent les DSSR.

Aux Philippines, la loi antiterroriste a été vivement critiquée pour avoir instauré un climat de peur parmi les défenseur·e·s des droits humains, notamment celles et ceux impliqué·e·s dans les droits des femmes et la santé sexuelle et reproductive. Les activistes, avocat·e·s, journalistes et syndicalistes sont régulièrement victimes de red-tagging, de menaces, de harcèlement et d’accusations infondées de terrorisme – surtout lorsqu’ils sont perçus comme proches de mouvements progressistes. De même, la loi sur l’armée nationale d’Indonésie suscite de sérieuses inquiétudes en matière de liberté de la presse et de droit à la liberté d’expression, en particulier pour les militant·e·s des droits des femmes et des droits reproductifs. De telles mesures autoritaires restreignent la liberté d’expression, criminalisent le plaidoyer et sapent davantage l’accès à des informations et services en santé reproductive fondés sur des données fiables.

L’instrumentalisation du langage des droits humains pour saper les DSSR et la justice

Une stratégie particulièrement insidieuse dans la régression mondiale des droits en matière de santé sexuelle et reproductive (DSSR) consiste à détourner le langage des droits humains pour faire avancer des agendas anti-droits. Des expressions comme « valeurs familiales » et « traditions culturelles » sont utilisées comme armes pour présenter les droits des femmes, des personnes LGBTQIA+ et des communautés marginalisées comme des menaces à la cohésion sociale et à l’identité nationale. L’égalité de genre, l’autonomie corporelle et les droits sexuels sont alors dépeints comme des atteintes à un prétendu « ordre naturel », permettant à des idéologies nuisibles d’être présentées comme des mesures de protection. En invoquant les droits et la morale, ces acteurs masquent leur volonté de restreindre la liberté reproductive et de miner les droits des femmes et des personnes LGBTQIA+, sous couvert de défendre des valeurs religieuses ou culturelles. Cette tactique ne fait pas que dissimuler des violations systémiques : elle sème également la peur et la confusion, affaiblissant le soutien public aux réformes progressistes.

Avec l’essor des technologies numériques, les acteurs anti-droits ont trouvé de nouveaux espaces pour s’attaquer aux avancées en DSSR. Bien que ces plateformes puissent favoriser l’accès à des informations et services de santé fiables, elles sont également utilisées comme outils de désinformation, de harcèlement et de contrôle. Ces groupes exploitent les réseaux sociaux pour lancer des campagnes de diffamation, censurer du contenu, et discréditer des initiatives fondées sur des données probantes, comme l’éducation complète à la sexualité (ECS). Pourtant, l’ECS est reconnue pour son exactitude médicale, son adaptation à l’âge et sa sensibilité culturelle. Néanmoins, ces groupes diffusent des récits anti-droits afin d’empêcher les jeunes d’accéder à des informations essentielles. L’impact est particulièrement fort dans les communautés marginalisées, où les sources alternatives sont rares, aggravant ainsi les inégalités existantes et privant les jeunes des outils nécessaires pour faire des choix éclairés concernant leur santé et leur avenir.

Ces efforts néfastes ont des conséquences tangibles. En Afrique subsaharienne, par exemple, les taux de grossesse chez les adolescentes dépassent 100 naissances pour 1 000 filles âgées de 15 à 19 ans, illustrant l’urgence de fournir des informations fiables et accessibles sur la santé sexuelle et reproductive. Aux Philippines, le gouvernement a déclaré la grossesse adolescente comme une urgence sociale nationale, soulignant davantage la nécessité de protéger les droits des jeunes en matière d’éducation sexuelle et d’accès aux services. Le refus de ces droits par la censure et la désinformation aggrave les inégalités sociales et économiques.

Le Moldova, autrefois à la pointe en Europe de l’Est en matière de soins reproductifs grâce à la télémédecine pour l’avortement, offrait des services sûrs, confidentiels et accessibles, notamment en zones rurales. Pourtant, l’interdiction récente de ces services, à la suite d’une pétition non fondée scientifiquement, constitue un recul flagrant des droits des femmes, ignorant les recommandations internationales en matière de santé. Cela souligne l’urgence de restaurer et de protéger l’accès à l’avortement.

Ces défis sont aggravés par une tendance croissante à effacer le langage inclusif du discours public. Les tentatives pour supprimer des mots tels que « femmes », « féminisme », « défenseur·e·s » et « militant·e·s » des documents officiels traduisent une volonté plus large de délégitimer et de faire taire les mouvements œuvrant pour la justice de genre et les DSSR. Cet effacement n’est pas uniquement symbolique : il reflète une campagne délibérée visant à invisibiliser, affaiblir et déconstruire les acquis et la puissance des groupes historiquement marginalisés, ainsi que celles et ceux qui défendent leurs droits.

Négliger l’intersectionnalité dans les DSSR

Une manifestation centrale de l’agenda des mouvements anti-droits est la négligence systématique de l’intersectionnalité dans la mise en œuvre des droits et de la santé sexuelle et reproductive (DSSR). Les systèmes d’oppression imbriqués – tels que le genre, la race, la classe, le statut socio-économique, le handicap ou la localisation géographique – multiplient les obstacles à l’accès aux services essentiels. Les communautés marginalisées, y compris les personnes vivant dans la pauvreté ou dans des zones isolées, ainsi que les femmes, les personnes LBTQIAP+, les travailleur·euse·s du sexe, les peuples autochtones et les personnes en situation de handicap, sont disproportionnellement touchées. Ces groupes subissent des violences et discriminations multiples, souvent renforcées par des normes culturelles néfastes et des politiques d’exclusion.

Par exemple, les personnes LBTQIAP+ sont fréquemment confrontées à la criminalisation, à la stigmatisation, aux viols dits « correctifs », au déni de justice, et à l’absence d’accès aux soins de santé affirmant le genre. Les peuples autochtones souffrent d’accaparements de terres et de dégradations environnementales, tandis que leurs savoirs et pratiques traditionnels (IKSPs) sont ignorés ou discrédités. Les personnes handicapées rencontrent des obstacles systémiques à l’accès aux soins maternels et à l’avortement – allant d’infrastructures inaccessibles à des attitudes discriminatoires de la part des prestataires de santé. Par ailleurs, les personnes vivant dans la pauvreté ou dans des zones rurales ont souvent un accès limité à des services de SSR de qualité à prix abordable, sans compromettre leur subsistance. L’absence persistante de services de santé sexuelle et reproductive inclusifs, complets, adaptés aux jeunes et non discriminatoires dissuade ces populations de recourir aux soins, entraînant ainsi des diagnostics tardifs, des traitements inadaptés et une aggravation de leur état de santé. Ces défis cumulés perpétuent les cycles d’inégalités et de marginalisation.

La crise climatique qui s’accélère illustre également les conséquences de cette négligence. Les changements climatiques touchent de manière disproportionnée les jeunes et les femmes, notamment dans les zones rurales et marginalisées. Par exemple, les femmes rurales dans les pays en développement subissent des pertes économiques bien plus importantes que les hommes lors d’événements climatiques. Les ménages dirigés par des femmes perdent environ 8 % de revenus supplémentaires à cause du stress thermique, et 3 % de plus à cause des inondations, par rapport aux ménages dirigés par des hommes – ce qui représente une perte estimée à 53 milliards de dollars par an. Les déplacements liés au climat augmentent également les risques de violences basées sur le genre et limitent l’accès aux services de SSR, notamment lors des urgences humanitaires. Ces réalités soulignent l’urgence d’adopter des approches intersectionnelles et sensibles au genre dans les stratégies d’adaptation au climat et de gestion des catastrophes.

Dans les zones de conflit, le besoin d’une approche intersectionnelle des DSSR est encore plus pressant. Les femmes et les personnes de genre divers sont exposées à des violences systématiques et extrêmes, y compris l’utilisation du viol comme arme de guerre. Des pays comme l’Afghanistan, la Palestine, l’Ukraine, la Géorgie, le Soudan du Sud ou la République Démocratique du Congo illustrent comment les conflits détruisent les systèmes de santé et érodent l’accès aux services essentiels de SSR. Les structures sanitaires sont souvent sous-financées, débordées ou délibérément détruites, privant les survivant·e·s de soins vitaux. Sans services de DSSR inclusifs, fondés sur les droits et tenant compte des traumatismes, les survivant·e·s de violences sexuelles liées aux conflits sont contraint·e·s de se reconstruire seul·e·s. Refuser l’accès à la SSR en contexte humanitaire constitue une violation des droits humains fondamentaux, précisément au moment où les soins sont les plus urgents.

Négliger l’intersectionnalité des DSSR ne compromet pas seulement les droits individuels, mais entrave également les progrès vers les objectifs de développement durable et de droits humains. Le développement durable, la résilience face au climat et l’égalité de genre ne peuvent être atteints sans reconnaître l’autonomie corporelle et répondre aux barrières multiples et croisées auxquelles les individus sont confrontés. Placer l’intersectionnalité au cœur des politiques et programmes en matière de DSSR est essentiel pour construire un avenir qui respecte la dignité et les droits de toutes les personnes – en particulier les jeunes, les femmes et les personnes de genre divers – quelles que soient leurs origines ou leurs conditions de vie.

Histoires de résistance et de solidarité pour faire progresser les DSSR

Malgré les reculs alarmants et l’opposition croissante aux droits et à la santé sexuelle et reproductive (DSSR), les mouvements pour la justice à travers le monde se lèvent avec force, tissant des liens de solidarité au-delà des frontières, des générations et des secteurs. Partout dans le monde, des militant·e·s, des communautés et des gouvernements avancent avec audace pour défendre l’autonomie corporelle et faire progresser la justice reproductive pour toutes et tous.

Un exemple puissant nous vient d’Arménie, où le 12 juillet 2024, l’Assemblée nationale a adopté des amendements majeurs à la Loi sur la santé reproductive humaine et les droits reproductifs. Ces réformes autorisent désormais les avortements médicamenteux jusqu’à huit semaines non seulement dans les hôpitaux, mais aussi dans des structures extrahospitalières agréées, élargissant ainsi considérablement l’accès. De même, le Danemark a réformé sa loi sur l’avortement pour la première fois en 50 ans, en prolongeant le délai légal à 18 semaines et en permettant aux filles de 15 à 17 ans d’y accéder sans consentement parental – une affirmation essentielle de l’autonomie et de la capacité des jeunes à prendre des décisions éclairées.

À travers le monde, ces évolutions progressistes dans la législation sur l’avortement soulignent l’impact de plaidoyers collectifs et durables menés par les mouvements féministes, les organisations communautaires et les défenseur·e·s des droits humains. Dans plus de 60 pays – dont l’Inde, le Mexique, la Tanzanie et le Bénin – les gouvernements ont répondu à la demande constante de reconnaître l’avortement sécurisé comme un droit humain fondamental. Ces réformes légales confirment ce que les militant·e·s affirment depuis longtemps : l’accès à l’avortement sécurisé et légal n’est pas seulement une question de santé publique, mais une question de justice, d’autonomie corporelle et d’égalité de genre.

Des avancées majeures en 2022 ont marqué une vague de progrès dans le monde en faveur des droits reproductifs. En février, la Cour constitutionnelle de Colombie a fait la une en dépénalisant l’avortement jusqu’à 24 semaines, une victoire pour le mouvement “vague verte” en Amérique latine. Un mois plus tard, la Haute Cour du Kenya a statué contre les arrestations et poursuites liées à l’avortement, renforçant ainsi la protection juridique des acteurs de la santé reproductive.

D’autres formes de résistance vont au-delà des réformes juridiques, s’attaquant aux systèmes plus larges de stigmatisation, de désinformation et d’inégalités structurelles. En France, par exemple, le gouvernement mettra en œuvre dès septembre 2025 une éducation sexuelle obligatoire et adaptée à l’âge, abordant des thèmes essentiels comme le consentement, l’identité de genre, le bien-être émotionnel et l’impact de la pornographie en ligne. En parallèle, l’Écosse est devenue le premier pays au monde à inscrire dans la loi le droit à des produits menstruels gratuits (loi sur la fourniture gratuite de produits menstruels) – une avancée inédite contre la stigmatisation menstruelle et la précarité menstruelle.

Les avancées en matière de DSSR sont également étroitement liées aux luttes pour l’égalité de genre et les droits LGBTQIA+. En Grèce, un vote historique le 15 février 2024 a légalisé le mariage et l’adoption pour les couples de même sexe, faisant de ce pays le premier à majorité orthodoxe à franchir ce pas – un acte fort en faveur de l’égalité et du droit à la famille. La Thaïlande a suivi en promulguant sa loi sur le mariage pour tous, entrée en vigueur le 22 janvier 2025, s’affirmant comme pionnière des droits LGBTQIA+ en Asie. Face aux coupes budgétaires mondiales et aux politiques régressives, l’Australie a réaffirmé son leadership international en lançant, début 2025, sa stratégie internationale pour l’égalité de genre, consolidant son engagement en faveur d’une politique étrangère féministe et d’un développement intersectionnel.

Ces jalons internationaux nous rappellent que la résistance n’est pas seulement possible – elle est bien vivante. Chaque victoire représente des années de lutte, de courage et de construction de coalitions. Elles témoignent également du pouvoir transformateur de l’action collective, surtout face à une opposition organisée et à des reculs institutionnels.

En cette période charnière, le leadership des jeunes, des femmes et des militant·e·s de genres divers est plus crucial que jamais. La lutte pour les DSSR et la justice nécessite un engagement communautaire soutenu, une organisation intergénérationnelle et une collaboration intersectorielle afin de démanteler les obstacles enracinés et de rejoindre les personnes les plus souvent laissées pour compte.

Exprimez-vous !

Le paysage politique de 2025 est certes complexe, mais il offre également une opportunité cruciale de reconquérir l’espace, de construire et renforcer les alliances, et de faire progresser un agenda transformateur pour les droits et la santé sexuelle et reproductive (DSSR), qui place au cœur de ses priorités la santé, la dignité et les droits des communautés marginalisées, y compris les jeunes, les femmes et les personnes de genres divers, dans toute leur diversité. En solidarité, nous nous levons dans une résistance collective face à ces attaques et reculs, affirmant avec force que cette lutte est la nôtre, pour nos droits.

En ce 28 mai, nous appelons les gouvernements et les institutions à :

  • Intégrer les DSSR et les droits humains dans les lois et politiques nationales, afin d’assurer leur alignement avec les engagements internationaux et les Objectifs de Développement Durable. Ces politiques doivent être traduites en services et programmes concrets et accessibles, générant un changement réel, notamment dans les zones géographiquement isolées et défavorisées (ZGID) et les communautés marginalisées.
  • Cesser les hostilités militaires, mettre fin aux conflits et occupations injustes, et donner la priorité à des processus de paix qui respectent les droits humains, la dignité et le bien-être de toutes les communautés touchées.
  • Garantir un leadership inclusif et équitable en assurant la participation réelle et significative des femmes, des jeunes, des personnes LGBTQIA+, des peuples autochtones et des personnes en situation de handicap dans les instances de décision politique.
  • Dépénaliser l’avortement et faire respecter le droit humain à des soins de santé reproductive sûrs, légaux et sans stigmatisation pour toutes et tous.
  • Garantir des financements pour les services de DSSR et investir dans des systèmes de santé inclusifs et transformateurs sur le plan du genre, qui répondent aux besoins des communautés marginalisées.
  • Protéger les espaces civiques et numériques afin que les défenseur·e·s des droits humains, les journalistes et les professionnel·le·s de santé puissent exercer leur travail sans censure, harcèlement ni violence, en ligne comme hors ligne.
  • Mettre fin aux lois discriminatoires et aux pratiques systémiques qui excluent ou criminalisent des personnes en fonction de leur SOGIESC, de leur âge, de leur origine sociale, de leur race ou de leur handicap.
  • Reconnaître et protéger les professionnel·le·s de santé et les défenseur·e·s des droits, en particulier dans les contextes de conflit, post-conflit ou à risque de catastrophe.
  • Intégrer les DSSR dans les réponses climatiques et humanitaires, en reconnaissant que la santé et l’autonomie corporelle sont des droits humains non négociables.
  • Combattre la désinformation et les récits toxiques qui alimentent la stigmatisation et sapent la santé publique, en adoptant et appliquant des politiques qui sanctionnent les campagnes de diffamation délibérées.
  • Affirmer la dignité menstruelle comme enjeu politique et de droits humains, en assurant un accès équitable, abordable et sans stigmatisation à la santé menstruelle, et en éliminant la précarité menstruelle ainsi que les barrières structurelles pour toutes les personnes menstruées.

Passez à l’action !

Mobilisez et organisez. Activez les organisations et les défenseur·e·s à tous les niveaux – local, régional et international – pour marquer le 28 mai par des événements diversifiés. Organisez des cercles d’apprentissage communautaire, des forums, des marches, des veillées et des caravanes de solidarité centrées sur la santé des femmes et la justice reproductive. Animez des ateliers DSSR destinés aux jeunes, aux peuples autochtones et aux groupes LGBTQIA+, et créez des espaces de dialogue intergénérationnel sur l’autonomie corporelle et la santé.

Exprimez-vous. Amplifiez vos revendications en partageant des messages puissants ancrés dans vos réalités. Rédigez des lettres ouvertes, des manifestes ou des prises de position. Publiez des blogs, tribunes ou fanzines fondés sur les expériences vécues. Co-créez des supports de campagne, infographies, affiches, vidéos explicatives, et assurez leur accessibilité en traduisant les messages dans les langues locales.

Faites du plaidoyer. Engagez les responsables gouvernementaux et les institutions pour promouvoir et défendre les DSSR. Soumettez des pétitions et des notes de politique publique. Prenez rendez-vous avec les parlementaires ou les autorités sanitaires locales. Exigez un financement accru pour les DSSR, soutenez la dépénalisation de l’avortement, et collaborez avec les allié·e·s et personnes influentes au sein des institutions.

Brisez la stigmatisation. Animez des ateliers et dialogues communautaires visant à déconstruire les mythes nocifs et à contester les normes de genre autour de l’avortement, des menstruations et de la sexualité. Créez des espaces sûrs pour les groupes de soutien et les cercles d’apprentissage entre pairs favorisant la compréhension, l’empathie et la guérison.

Investissez les espaces numériques. Utilisez les plateformes digitales pour mener des actions militantes en ligne. Organisez des rassemblements virtuels, des Skeet-a-thons (sur Bluesky), des prises de contrôle Instagram, ou des défis TikTok. Utilisez des hashtags comme #WomensHealthMatters #SRHR4ALL #28Mai. Animez des discussions en direct, produisez du contenu numérique – podcasts, reels, vidéos explicatives – pour favoriser l’engagement. Lancez des pétitions et des plateformes d’action en ligne pour mobiliser les soutiens.

Utilisez le pouvoir des récits. Mettez en lumière des histoires personnelles de femmes, de militant·e·s et de professionnel·le·s de santé. Collectez ces récits à travers des interviews, micro-documentaires, podcasts ou événements communautaires de narration.

Pratiquez l’artivisme. Utilisez l’expression créative – fresques murales, pancartes, performances, danse et musique – pour amplifier les appels à la justice et aux DSSR. Organisez des séances d’art-thérapie ou des activités artistiques collaboratives offrant un espace de guérison et de réflexion.

Inspirez l’action. Célébrez les victoires locales, les avancées législatives et les changements de normes sociales. Partagez les enseignements et stratégies des campagnes passées à travers des rapports, des forums et des témoignages communautaires. Utilisez ces moments pour donner un élan nouveau à vos actions futures.

Collaborez. Renforcez la solidarité inter-mouvements avec les acteurs de la jeunesse, du climat, du travail, du handicap et d’autres luttes fondées sur les droits. Alignez les actions régionales et mondiales pour un impact renforcé. Un engagement communautaire durable et une collaboration intersectorielle sont essentiels pour démanteler les barrières systémiques et atteindre les personnes le plus souvent laissées pour compte.